Extraits du livre
— Vous qui êtes souvent envoyés ici par le parti pour superviser les campagnes électorales ou pour autre chose, vous nous avez déjà assez trompés comme ça. Je te le dis ici, devant le Chef de Terre, le Maire et le CB, au nom de tout ce monde. Il balaya la foule derrière lui avec sa main droite, venue massivement t’écouter. Je te dis tout haut ce qu’ils disent tout bas : Ça suffit !
La foule se déchaina comme un coup de tonnerre par des cris, applaudissements et sons de tambour prolongés pour confirmer ces déclarations.
— Je dis bien, ça suffit ! cria-t-il. Le silence s’imposa du coup comme si c’était un ordre qui s’adressait à la foule. Au début, ce que vous nous disiez était très sucré dans nos oreilles et nous applaudissions à tue-tête avec un enthousiasme fou. Les promesses étaient comme des réalités, car vos paroles nous aveuglaient. Six ans plus tard, aucun projet n’a vu le jour chez nous. Hier encore, même comme vos paroles étaient devenues fades, nous les avons tout de même avalées en murmurant dans nos gorges. Au bout du compte, nos attentes par rapport à vos promesses renouvelées sont restées vaines comme d’habitude. Aujourd’hui, même si tu es notre fils, tu n’es pas différent des autres précédents menteurs, car tu as été envoyé par les mêmes menteurs-en-chef pour venir faire la même chose ; ils t’ont dicté les mêmes consignes : nous déverser de nouveaux mensonges pour justifier les précédents. Donc, moi je te le dis ouvertement, tout ce que tu viens de nous débiter tout à l’heure n’est ni sucré ni fade, mais plutôt amer, très amer dans nos cœurs. Ne te fie pas à ces applaudissements trompeurs, c’est pour te distraire. Nous avons décidé que nous n’avalerons plus vos bêtises, trop, c’est trop.
La foule se déchaina, elle était en liesse, comme pour célébrer une victoire qu’elle attendait depuis des années. Il y avait la poussière en l’air comme au passage d’un troupeau de plus de cent bœufs en courant ; Mbango se sentit tout petit dans son fauteuil de leader. Il vivait Le Monde s’effondre de Chinua Achebe en direct avec en face de lui l’intransigeant Okonkwo. Les autres responsables étaient cois.
— Ton discours de lancement de campagne n’augure rien de bon pour nous. Donc, arrête ton massacre et rentre dire à tes chefs que nous, tes parents, nous ne voulons plus les mots, mais plutôt des actes. Vos carottes sont cuites ici, paroles d’un ancien cuisinier.