Extraits du livre
C’est à ce moment-là que ça s’est passé pour la première fois. Il l’oblige à faire des choses qu’elle ne veut pas faire, qu’elle ne comprend pas, qui la dégoûtent. Elle essaie de se défendre, de s’échapper, mais il est tellement plus fort qu’elle. Elle voit son regard exorbité, elle sent son haleine, elle entend ses cris de jouissance. Il la maintient de force et elle se sent mourir.
Elle essaie péniblement de se débattre avec des mots : elle va tout raconter à Grand-mère à son retour.
Alors il la menace. Si elle parle, il ira tuer Le Chat ! L’avertissement est clair, inquiétant, tragique, pathétique.
Elle a peur, se met à trembler, devient blême, tout son corps crie au secours mais elle ne peut rien faire que se soumettre et subir.
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Va-t-elle avoir la force de survivre à ce deuil cruel ?
Après le déni qu’ils ont partagé, la colère l’envahit douloureusement : colère contre celle qui lui a pris son amour, colère contre celui qui a brisé son âme à tout jamais, colère contre le monde entier, contre elle-même aussi.
Elle s’en veut de s’être laissé envahir à ce point par un amour insensé.
Et puis le désespoir survient, désespoir de se retrouver, une fois de plus, confrontée à une solitude accablante qu’elle ne se donne pas le droit d’exprimer.
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Elle espère qu’en lui donnant tout d’elle, son amour, sa jeunesse, il va redevenir comme avant. Avant, quand il était si doux, si patient, si amoureux, si…
Parfois, c’est plus fort qu’elle, elle a besoin de respirer, de souffler, de s’évader, mais dès qu’elle s’éloigne, il la rattrape et le cercle vicieux s’inverse, il la supplie, la persuade avec des larmes, promet de l’aimer encore et encore. Il veut la posséder.
Elle étouffe. Elle ne se sent plus personne. Qui suis-je, pour être traitée comme un objet que l’on veut avoir, que l’on rejette ou que l’on brise ?
La colère gronde à l’intérieur mais n’ose pas sortir. Parce qu’elle a peur d’être battue une fois de plus.